Rénover, transformer, innover

Face à la pénurie de logements en France et aux défis environnementaux du secteur de la construction, la réversibilité devient un atout majeur de l’économie circulaire autant du point de vue de la construction éco-responsable que du recyclage du foncier et de la lutte contre l’étalement urbain.

Confrontés à l’obsolescence de plus en plus rapide des immeubles de bureaux, les promoteurs et bailleurs initient de plus en plus ce type de projets. Les grands pôles urbains représentent le marché le plus rentable autant dans le secteur du logement que dans celui du tertiaire. Depuis ces dernières années, on note un net recul de la demande du tertiaire, ce qui entraîne une surproduction de bureaux, quand au contraire les besoins en logement n’ont fait que s’accroître.

Quels sont les problématiques de la réversibilité des bureaux en logements ?

En préambule d’une recherche sur la réversibilité bureaux en logements, il convient de s’intéresser aux opérations qui ont déjà vu le jour afin d’en comprendre les problématiques et les points de vigilance.

En s’appuyant notamment sur l’analyse de l’APUR sur « La transformation de bureaux en logements à Paris de 2001 à 2012 » on peut dégager trois grandes typologies de reconversions : les bâtiments historiques antérieurs à 1900 (notamment le tissu haussmannien), les bâtiments des années 40 à 70 et les bâtiments datant d’après les années 80.

 

LES BÂTIMENTS HISTORIQUES 

 

FIG 1 – Bat Historique

Ces bâtiments ont, bien souvent, déjà opéré une première conversion de logements en bureaux avant de revenir au logement. Ils ont donc, de fait, des caractéristiques dimensionnelles qui se prête à ce type de programme : épaisseur de 6 à 14m en double orientation, hauteur sous plafond de 2,20 à 4,00m, et percements de façades déjà propres aux plans de logement. Côté rue, les façades en pierre imposent une isolation par l’intérieur. Côté cour, les façades moins travaillées en enduit permettent une isolation par l’extérieur. La reprise des toitures avec lucarnes ou chiens-assis augmentent la superficie des surfaces allouées aux logements grâce à l’aménagement des combles.

Une des difficultés principales, réside dans la structure en murs de refend et dans l’exiguïté des cours qui rendent parfois difficile l’agencement et notamment l’ajout des pièces humides – aux normes PMR – qui n’étaient pas prévues à l’origine. De même, les créations de trémies pour les nouvelles circulations verticales aux normes sont compliquées (planchers bois, etc) et s’avèrent onéreuses.

 

LES BÂTIMENTS DES ANNÉES 40-70 

FIG 2 – Bat 1940-1970

Ces bâtiments, prévus dès leur conception pour un usage de bureaux, présentent néanmoins des caractéristiques intéressantes pour leur transformation en logements. Les plans de ces immeubles tertiaires sont basés sur une structure poteaux-poutres ; leurs dimensions, qu’il s’agisse de leur épaisseur de 9 à 15m comme de leur hauteur sous plafond de 2,70 à 4,00m, permettent aisément la conception des appartements conformes aux exigences actuelles.

Cette souplesse de conception est cependant contrebalancée par un coût de travaux relativement important notamment lors des opérations de dépôt total des façades légères trop vitrées et non isolées, ou lors du désamiantage du bâtiment, etc.

 

LES BÂTIMENTS DE 1980 ET PLUS 

FIG 3- Bat à partir de 1980

Depuis les années 80, l’architecture des immeubles de bureaux a cherché à être rentabilisée au maximum et ce, en optant pour une conception incluant des caractéristiques spécifiques : une épaisseur en double orientation jusqu’à 18 voire 20m, une hauteur sous plafond de 3,5 à 4m avec un faux plafond et/ou un faux plancher, une façade très vitrée et un plancher en béton parfois très fin.

De par leur rationalisation constructive, ces typologies de bâtiments sont moins facilement reconvertibles. Malgré la liberté offerte par la structure poteaux-poutres, les épaisseurs trop importantes des bâtiments imposent la création de patios ou de cours afin d’apporter l’éclairage naturel nécessaire aux logements.

 

Réversibilité de bureaux en logements : transformation de la tour Orion à Montreuil

 

FIG 4 – Bat existant Tour Orion

D’une façon générale, on s’aperçoit que les immeubles de bureaux des années 40 à 70 sont surreprésentés dans les projets actuels de transformation en bureaux en logements. La liberté d’agencement permise par la structure poteaux-poutres comme leurs caractéristiques dimensionnelles proches de celles du logement en font des cas d’études très intéressants dans notre pratique récente.

C’est le cas de l’étude que nous avons menée à Montreuil pour le projet de transformation de la tour de bureaux Orion en logements en coliving. En développant une analyse du bâti, celle-ci nous a permis d’adapter la trame des appartements à la trame classique de 1,35 m des plans des bureaux. Le découpage que nous avons fait des logements s’adapte à la façade de la partie existante, en complément nous avons proposé la conception d’une nouvelle façade sur les extensions du bâti.

FIG 5 – Schéma toitures végétalisées, Tour Orion
FIG 6 – Schéma serres, Tour Orion

Il reste toutefois à noter que même si certaines conditions de reconversion sont remplies dans l’existant, les questions de la gestion des fluides, de la règlementation incendie, d’isolation et de ventilation restent des sujets qu’il faut lancer à l’étude dès la conception d’un bâtiment réversible.